Oriol Vilanova
Renoncer à te décrire
Inauguration et apéritif
le jeudi 22 mai 2014 (pendant la Nuit des Bains) dès 17h.
Vernissage de l’exposition dès 18h.
Exposition du 23 mai au 11 juillet 2014.
L’artiste comme collectionneur, Oriol Vilanova est un collectionneur de cartes postales, ce support de communication, touristique et désuet, qui porte en lui-même les traces d’une mémoire tant individuelle que collective. L’image d’Épinal, de monuments, de lieux iconiques et historiques, imprimée sur un simple carton, offre une vision idéalisée du monde, chargée de nostalgie, de sujets immuables et témoignant pourtant d’un temps irrémédiablement perdu. Oriol Vilanova travaille le plus souvent sur les notions de mémoire individuelle et collective, de temps perdu, d’immortalité de la figure héroïque et iconique, de monument et de stéréotype, rejouant par l’écrit, la performance ou l’installation une documentation très riche en images – films, publications, imprimés, cartes postales – et créant des télescopages et des va-et-vient temporels entre passé, présent, futur.
Les cartes postales illustrent autant l’exaltation et l’embellissement du sujet – les monuments, les sites historiques et touristiques – que son usure et sa dégradation jusqu’à la ruine. A la fois le support magnifié d’une identité, d’une culture, de son histoire et sa pérennité, elles représentent la preuve en image de l’irrémédiable perte, témoins inoffensifs et légers du temps qui passe, déjà révolu. Ces images stéréotypées semblent éternelles, chargées d’une tristesse romanesque et littéraire, lessivées et usées par leur reproduction à l’identique et à l’infini. Ces milliards de cartes postales offrent en images une traversée du XIXe au XXIe siècle, principalement du point de vue occidental, qui illustre la glorification de son histoire et son irrémédiable épuisement.
Davantage encore que la photographie, la carte postale porte en elle-même un supplément romantique en gardant la trace de tous les messages « à découvert », lisibles par tous ; ces mots d’affection, ces souvenirs de voyage, d’une échappée, d’un temps heureux et de liberté. Comme l’image, le texte est tout aussi stéréotypé, court, simple et réduit à des formules sentimentales, sorte de mot-clef, qui crée un lien familier aussi bien intime que collectif.
Si la carte postale reste le support parfait du marketing touristique, elle garde aussi la marque de son époque de production. Au-delà du sujet, la technique de reproduction, le traitement de l’image – noir/blanc, couleurs, lumière, cadrage – et les différents caractères typographiques témoignent de l’histoire de l’imprimé, de la publicité et font appel, là encore, à notre mémoire collective.
La carte postale, sorte d’édition idéale, bénéficie en réalité d’une diffusion massive, démocratique, ininterrompue, reproduite à l’infini et continuellement recyclée, à la fois datée et périodiquement réactualisée. Elle offre l’illustration d’un lieu particulier par un support universel, accessible à tous. Des images égarées qui réémergent au hasard, très près ou très loin de leur lieu initial. Ces images propagées, dispersées, égarées, redistribuées, figurent les parties d’un tout, impossible à reconstituer.
La figure de l’artiste-collectionneur est évidemment connue, de Marcel Broodthaers à Christian Boltanski, de Claude Closky à Mike Kelley. La collection est un pur geste de réappropriation, une forme éditoriale, un commentaire, qui par le simple choix d’un corpus d’objets ou d’images, retirée de la multitude, de la dissémination et de la perte, recrée un univers particulier, circonscrit, où l’accumulation et la répétition oscillent entre le plaisir et saturation.
Oriol Vilanova parcours les marchés aux puces du monde entier à la recherche de cartes postales, qu’il regroupe par sujets génériques : arcs de triomphe, grottes, couchers de soleil, etc.
Au CEC et pour sa première exposition personnelle en Suisse, Oriol Vilanova présentera une de ses collections de cartes postales, SUNSETS FROM … et envisage de constituer une nouvelle collection, qui prendra la forme d’une édition, ONE HUNDRED AND FIFTY, 150 cartes postales différentes représentant des grottes spectaculaires du monde entier, avec au dos de chacune des cartes postales un tampon portant l’inscription : THE COLLECTION WILL BE COMPLETE WITH THE OTHER 149 POSTCARDS, sous enveloppe. Edition du Centre d’édition contemporaine, 2014. Edition offerte aux membres 2013 de l’association du CEC.