Denis Savary, Blood on the Dining-Room Floor, vidéo, son, 8’53”, boucle, 2024
Blood on the Dining-Room Floor emprunte son titre au premier roman policier de Gertrude Stein, rédigé après le succès de L’Autobiographie d’Alice B. Toklas. Stein entreprend l’écriture du roman alors qu’elle séjourne dans une maison de campagne, à Bilignin, dans l’Ain, avec sa compagne Alice, en s’inspirant des faits divers et des intrigues de la vie de ce petit hameau. Avec cette vidéo, Savary revient sur une période spécifique de son travail, celle des vidéos produites au début des années 2000 qui, pour la plupart, étaient filmées depuis ou dans l’environnement immédiat de sa maison familiale. Réalisées en miniDV, un mode de production révolu, ces vidéos représentent une époque où la maison servait d’atelier et de base d’observation du monde. Curieusement, parmi les maisons miniatures de la série Villa, celle choisie pour Blood on the Dining-Room Floor ressemble à la maison dans laquelle a grandi l’artiste.
La vidéo est accompagnée d’une pièce sonore éponyme, le résultat d’une commande faite aux artistes compositrices Maria Esteves et Mathilde Hansen. Le son et l’image sont fusionnés, mais semblent a priori en décalage, comme une danse off the beat. Ce n’est que progressivement que le mouvement ralenti de la maison révèle la complexité d’un son House, multipiste, d’où émerge une voix qui scande des extraits du roman de Gertrude Stein. La vidéo dissimule un jeu de mots, entre le style musical, la House, et le sujet central du film, la maison d’enfance de l’artiste. Entrainée dans un mouvement de rotation, la Villa de la vidéo Blood on the Dining-Room Floor rappelle les boules à facettes des dancefloors qui projettent des rayons lumineux et colorés.
Denis Savary (1981) vit et travaille à Genève. Son travail a été présenté à l’occasion de nombreuses expositions personnelles, comme récemment : Josy’s Club, avec Pierre-Olivier Arnaud, Synagogue de Delme, Delme (2023) ; Octogone, avec Chloé Delarue, Mayday, Bâle (2023) ; Flower of Fog, GNYP Gallery, Berlin (2022) ; Ithaca, Galerie Maria Bernheim, Zurich (2021) ; Ambarabà Cicci Cocco, avec Alfredo Aceto, Stiftung Kunst Halle Sankt Gallen, Saint Gall (2021) ; Ventimiglia, Galerie Maria Bernheim, Londres (2021) ; Phantom, Lemme, Sion (2021). Parmi ses nombreuses expositions collectives récentes, citons : Temps de Mars, Musée des Beaux-Arts, La Chaux-de-Fonds (2024) ; The Big Chill, Galerie Maria Bernheim, Londres (2023) ; Mirage, MCBA, Lausanne (2023) ; Deep Deep Down, MUDAM Luxembourg, Luxembourg (2023) ; The Puppet Show, Centre d’art contemporaine, Genève (2022) ; Inventaire, Mamco, Genève (2021) ; Ballard in Albisola, Casa Jorn House, Albisola (2021) ; La Suite – Regards sur les artistes des collections des Frac, Institut d’art contemporain, Villeurbanne (2021) ; Body Double, Galerie Maria Bernheim, Londres (2021). En 2024, le travail de Denis Savary fera l’objet de plusieurs expositions personnelles et collectives : Fonderia Artistica Battaglia, Milan ; Denis Savary, Galerie Maria Bernheim, Londres ; Roma, Roma, Roma, Rolex Learning Center, Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. En 2025, il sera exposé au KBCB Kunsthaus Biel Centre d’art, Bienne.
Ce projet bénéficie du soutien de l’Office fédéral de la culture et de la République et canton de Genève, de la Fondation Leenaards et la Fondation Ernst und Olga Gubler-Hablützel.
Caroline Schattling Villeval, When a frog meets a dog, vidéo d’animation, 5′, boucle, 2024
Au fond d’un lac quasi asséché, des grenouilles sont réunies autour d’une flaque d’eau. Leurs mouvements, au ralenti, presque imperceptibles, donnent vie à ce paysage désertique. Un chien entre dans le champ. Imposant, il déborde du cadre. Sa marche lance un mouvement panoramique.
Ainsi débute la vidéo de Caroline Schattling Villeval When a frog meets a dog, réalisée pour son exposition Carences et toute-puissance1. Cette nouvelle production s’inscrit dans la continuité de l’installation good boy (Hasch, Marseille, 2023) articulée autour du texte fictionnel Vie/Chienne, dans lequel est abordée la question de la domination en partant de l’interaction non consentie entre une personne et un chien à la langue baladeuse2. L’animal est à nouveau un des protagonistes de When a frog meets a dog, mais cette fois aux côtés de grenouilles.
Immense corps élancé au pelage doré, le chien animé par Caroline Schattling Villeval avance, menaçant. Il semble indifférent à tout, y compris aux amphibiens qui décident de se réunir pour stopper sa marche. Dressés en colonne, ils font masse devant cette manifestation de toute-puissance. Le contre-pouvoir, qui prend corps dans la force du groupe, est balayé d’un coup de patte. Il ne fait pas le poids. Échec cuisant : il pleut des grenouilles. Elles éclaboussent jusqu’à l’espace d’exposition, contaminent la salle. Le pouvoir absolu triomphe sur la force du collectif. Fin de l’histoire ? Dans When a frog meets a dog, les rapports de force s’exercent de manière sous-jacente à travers le processus technique. Un chien, des grenouilles, un bestiaire en modélisation 3D acheté en ligne comme on adopterait un animal : un acte de domination. Vient ensuite l’ordinateur. Loin de fonctionner de manière autonome, l’artiste tire les ficelles de ses pantins virtuels via un logiciel d’animation. Enfin, le chien, jamais entièrement visible, domine les grenouilles comme l’espace. Le chien, la première espèce animale domestiquée par l’Homme – son « meilleur ami » –, que Caroline Schattling Villeval a dressé pour entrer dans sa ronde. L’image tourne en boucle, mais qui mène la danse ? When a frog meets a dog estun tableau dans lequel les rapports de force se superposent en couches infinies.
1. Parallèlement à son exposition au Centre d’édition contemporaine, Caroline Schattling Villeval présente StéréoMimicry à la Salle Crosnier, Palais de l’Athénée, du 12 janvier au 10 février 2024. 2. Vie/Chienne a été rédigé par Caroline Schattling Villeval en 2023. Le texte est à paraitre dans [SWISS] Weird & Magic #1 aux éditions Clinamen.
Née en 1995 à Zürich, Caroline Schattling Villeval vit et travaille à Genève. Son travail a été exposé dans divers espaces en Suisse ainsi qu’à l’étranger dans le cadre d’expositions personnelles, comme : StéréoMimicry, Salle Crosnier, Genève (12.01–10.02.2024) ; good boy, Hasch, Marseille (2023) ; No firing, avec Paul Paillet, Espace 3353, Carouge (2021) ; Chiara Chiara Chiara, Zabriskie Point, Genève (2020) ; Being fucked, Lokal-int, Bienne (2020). Elle a également participé à plusieurs expositions collectives, notamment : Basel Social Club avec Joyfully waiting, Bâle (2023) ; MINIMIRACLES, Sonnenstube, Lugano (2023) ; Bourses déliées – Arts Visuels, Halle Nord, Genève (2022); Prix Kiefer Hablitzel, Art Basel, Bâle (2022) Esprit d’Escalier, avec Paul Paillet, Centre d’édition contemporaine, Genève (2022) ; Plaisirs Minuit, Forde dans le cadre du Fesse-tival, Genève (2022) ; Peeping through the looking glass, Set Space, Londres (2021) ; Fotoromanza, Le Commun, Genève (2021) ; Silicon Malley, Prilly (2020) ; Weaving home, Limbo Space, Genève (2020).
Ce projet bénéficie du soutien de la Ville de Genève, et de l’Office fédérale de la culture et de la République et canton de Genève.
Paul Paillet, Surprise/Innocence, vidéo d’animation, 7’24’’, musique, 2023
Le travail de Paul Paillet compose le récit fragmenté d’une histoire intime immergée dans l’histoire collective, mêlant aussi bien des références à la pop culture qu’à la culture underground des années 1990-2000.
Surprise/Innocence, de Paul Paillet, est un vidéo-clip d’animation réalisé à partir d’une série de dessins. Avant de procéder à une technique personnelle de collage, Paillet maroufle son papier dans un moule, ce qui lui confère un léger effet de gaufrage. La colle utilisée est teintée de pigments naturels. Au moment du séchage, le papier se détache du moule imprégné de couleurs, souvent vives et acidulées. Ce procédé laisse transparaître un dessin final à l’aspect aqueux sur la surface du papier.
C’est en suivant cette même méthode que Paul Paillet a réalisé le décor de Surprise/Innocence, une succession de collines sur fond de soleil couchant et d’architectures plus ou moins énigmatiques duquel un personnage tirant grossièrement la langue surgit subitement, dans une danse à la fois hypnotique et malhabile. Au format vertical rappelant les écrans de smartphone, l’animation tourne en boucle sur une bande sonore Hardtek à laquelle se joignent les voix des membres du groupe de K-pop, BTS. Ils lisent, en réalité, des extraits du roman Demian. Die Geschichte einer Jugend de Hermann Hesse (1919), ironique croisement entre l’esprit alternatif des années 60 et le boys band interplanétaire sud-coréen.
Paul Paillet (1986, Dijon) vit et travaille à Genève. Son travail a été présenté dans le cadre de diverses expositions individuelles, comme : Fantasy à la Salle Crosnier, Genève (2022) ; Fascination for fire au Centre d’édition contemporaine, Genève (2020). Il a également participé à plusieurs expositions collectives : Sublime Rage à French Place, Londres (2022) ; Atmosphères à la Pace Gallery, New-York (2021).
BTS, WINGS, Shortfilm #1, Begin
The realms of day and night, two different worlds coming from two opposite poles, mingle during this time.
BTS, WINGS, Short Film #2 LIE, 2016
My parents’ house made a realm. This realm was familiar to me in almost every way, mother and father, love and strictness, model behaviour and school.
BTS, WINGS, Short Film #3 STIGMA, 2016
It was the first fissure in the columns that had upheld my childhood which every individual must destroy before he can become himself. Such fissures and brands grow together again, heal, and are forgotten, but in the most secret recesses they continue to live and bleed.
BTS, WINGS, Short Film #4 FIRST LOVE, 2016
There are enormous ways which god can make us lonely and lead us back to ourself. This was the way he sealed with me at that time.
BTS, WINGS, Short Film #5 REFLECTION, 2016
The other realm, however, overlapping half our house was completely different. A loud mixture of horrendous, intriguing, frightful, mysterious things, including slaughterhouses and prisons, drunkards, scratching fishwives, calving cows, horses sinking to their death, tales of robberies, murder and suicide.
My sin was not specifically this or that, but consisted of having shaking hands with the devil. The devil held me in his clutches, the enemy was behind me.
BTS, WINGS, Short Film #7 AWAKE, 2016
The bird fights its way out of the egg. The egg is the world. Who had been born must first destroy a world. The bird flies to God. That God’s name is Abraxas.
BTS, WINGS, “Blood, Sweat & Tears”, 2016
He too was a tempter. He too was a link to the second, the evil world with which I no longer wanted to have anything to do.
Ce projet bénéficie du soutien de l’Office fédérale de la culture et de la République et canton de Genève.
Guillaume Dénervaud pratique autant le dessin, l’imprimé, la sculpture que l’installation avec un intérêt pour des formes issues de la science-fiction, du cinéma, de la bande dessinée ou de la littérature. Il s’inspire également du réel, mêlant des références à des objets décoratifs et utilitaires, retrouvant des matériaux, des techniques et des formes souvent issues de l’artisanat, du design ou plus simplement de la culture populaire et du quotidien. Il croise des modes de production contemporains et des pratiques traditionnelles, oubliées ou redécouvertes. Le travail graphique de Guillaume Dénervaud, soigneusement exécuté à la main, convoque la précision et la rigueur des dessins techniques industriels et mécaniques. Mais, à y regarder de plus près, le langage graphique figuratif de ces derniers cède la place à une abstraction poétique composée d’infinies combinaisons de formes cellulaires, rondes et serpentine, interconnectées aux textures soyeuses des rendus numériques.
AGLOROMONES est le premier travail vidéo de Guillaume Dénervaud. Il présente une sélection d’images tournées en extérieur qui incarnent la matière brute des recherches et préoccupations anthropiques qui sous-tendent l’ensemble du travail de l’artiste. Tournées sur le trajet qui sépare l’ancien lieu de résidence de Guillaume Dénervaud dans le 18ème arrondissement de Paris et son atelier à Saint-Denis, les images documentent les observations quotidiennes de l’artiste sur cette partie de la ville en pleine mutation. AGLOROMONES propose une série de scènes filmées entre abstraction et réalité, une traversée d’espaces interstitiels et périphériques ; des zones de transit entre ville et campagne.
Guillaume Dénervaud (1987, Fribourg) vit et travaille à Paris. Son travail a été présenté dans le cadre de diverses expositions individuelles, comme : Syntetic Splinter, à la galerie Bel Ami, Los Angeles (2023), Surv’Eye, au Centre d’édition contemporaine, Genève (2021), STRATA à La Cristallerie, Saint-Louis (2020). Il a également participé à de nombreuses expositions collectives : La main-pleur à la Kunsthalle Friart, Fribourg (2022), Des corps, des écritures, au Musée d’art Moderne de la Ville de Paris (2022), Les formes du transfert, aux Magasins Généraux, Paris (2022).
Le projet Videos: new and revisited bénéficie du soutien de l’Office fédérale de la culture et de la République et canton de Genève.
La vidéo de Guillaume Dénervaud AGLOROMONES bénéficie du soutien du Fonds cantonal d’art contemporain du canton de Genève.