Anne-Julie Raccoursier
Wireless World, BAC, Genève
Exposition du 13 octobre au 16 décembre 2007
Vernissage le vendredi 12 octobre 2007, dès 18h
C’est bien connu, les Finlandais n’ont pas froid aux yeux. Ils sont souvent friands de compétitions sportives insolites : le lancer de téléphone portable, le porter d’épouse, l’écrasement de moustiques ou l’endurance au sauna. Dans un même esprit, se tient tous les ans, non loin du Cercle polaire, une épreuve de guitare électrique imaginaire à laquelle Anne-Julie Raccoursier a consacré un travail vidéo. Intitulé Noodling (2006, 7’20’’), il révèle, en gros plan, des concurrents aux looks très étudiés, clones improbables de Frank Zappa ou de Billy Idol. Ils singent la gestuelle de ces musiciens au point culminant de leurs shows. L’état d’exaltation des candidats est tempéré par l’absence de bande sonore. Une distance supplémentaire nous éloigne d’eux : au ralenti, leurs mouvements, parfois cachés dans le hors champ de l’image, semblent chargés d’un affect qui suggère autant le plaisir (solitaire) que la douleur, l’extase que l’hystérie.
La formule d’Andy Warhol selon laquelle tout le monde est appelé à connaître son quart d’heure de célébrité trouve ici un écho inattendu. Il y est certes question du culte de la performance, de l’image et des sens sécrétés par notre « société du spectacle ». Mais la concurrence généralisé e et le désir farouche d’exister aux yeux des autres tourne à vide dans cette parodie d’événement, comme s’il s’agissait de transformer en spectacle l’absence même de contenu.
Dans une photographie récente, Anne-Julie Raccoursier observe une gated community, phénomène immobilier en pleine expansion. Le paysage idyllique, dont l’ordonnance et la propreté cliniques ressemblent à s’y méprendre à celles d’une maquette, offre aux happy few de ces « ghettos dorés » parcs, piscines, courts de tennis, parcours de golf et terrains d’aviation privés. Mais le revers du maintien féroce de ces privilèges réside dans le hors champ : un arsenal de gardiens, caméras de surveillance et clôtures grillagées préservent ce paradis tronqué. Or, ces espaces de libertés simulées, dignes du Truman Show, symboles de la réussite sociale et de la jouissance maximalisée façonnés par le rêve américain, constituent l’un des « symptômes des pathologies urbaines » (Renaud Le Gloix), guidées par les logiques d’exclusion sociale et du « tout sécuritaire ».
Le Centre d’édition contemporaine présente au Bac – Bâtiment d’art contemporain, du 13 octobre au 16 décembre 2007, la première exposition personnelle d’Anne-Julie Raccoursier (née en 1974 à Lausanne, vit et travaille à Lausanne et à Genève). A cette occasion, un travail vidéo récent ainsi qu’une édition (Remote Viewer 2 et Remote Viewer 3, deux photographies couleur, 121 x 200 cm, tirées à 3 exemplaires chacune, 1 e.a., 1 H.C., numérotées, datées et signées, édition du Centre d’édition contemporaine, Genève, 2007) seront exposés.